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J’ai rencontré une femme de soixante ans, d’une physionomie singulière : ses cheveux blancs prouvaient son âge ; mais sur la peau du visage n’apparaissait pas la moindre ride. Cette femme me dit son secret : toute sa vie elle avait eu recours aux lotions les plus répétées. Le soir et le matin, et toutes les fois que quelques chagrins lui avaient fait verser des larmes, elle se jetait sur le visage un léger nuage de poudre de riz.

La peau est un thermomètre certain sur lequel se constatent les oscillations de la santé ; lorsque tout se passe régulièrement dans notre être, le thermomètre est au beau ; la transpiration insensible donne alors à la peau de la souplesse, des reflets chatoyants à tous les méplats du visage, du lustre à la chevelure ; lorsque cet état se produit, on appelle cela être en beauté.

Commettez un excès, que l’estomac soit irrité, le pouls un peu fébrile, cette transpiration insensible se supprime, la peau devient sèche, perd son éclat, sa transparence, les cheveux n’ont plus de souplesse.

Cet état presque maladif de la peau, c’est l’état normal et continuel de la peau écailleuse du vieillard. Les vaisseaux capillaires les plus ténus de la peau du visage ne s’injectent plus instantanément chez les vieillards. D’abord la sensibilité qui produit cette rougeur fugitive et indiscrète lui manque, et, de plus, le réseau si ténu des vaisseaux capillaires du visage résisterait à ces légères ondées du sang artériel. Le vieillard ne rougit plus ; il est doublement à l’abri de ces colorations du visage qui trahissent les secrets du cœur de l’enfance et de la jeunesse.

On se préoccupe surtout dans un âge avancé des me-