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les présences invisibles

obscure survie et, en face de cette nature matérielle où tout se transforme sans se perdre ni s’anéantir, ils se demandent malgré eux pourquoi ce qui en eux pense, veut, désire, ce qui constitue leur personnalité, se dissiperait sans laisser de traces, comme la forme insaisissable d’un nuage…

« Mais alors, quelle est donc cette flamme immortelle

Qui, partant d’un grand cœur, dépasse son destin ?…
Et dont la force vive et si brûlante est telle

Qu’elle brille le soir plus haut que le matin[1] ? »

Nous aimons certains êtres autant et mieux que nous-mêmes ; il faut les voir disparaître, assister à la métamorphose de cette physionomie rayonnante d’intelligence et de tendresse, de ce cœur ardent et généreux en une froide, une insensible effigie qui deviendra bientôt un méconnaissable objet d’horreur. Quelle révolte alors, quel sursaut indigné de l’âme, de ce dieu intérieur qui s’insurge violemment, obstinément, contre l’atroce apparence, qui regarde autre part, qui crie au disparu : Tu n’es plus là ! Tu es ailleurs !… et qui ajoute quelquefois, poussé par

  1. Gérard d’Houville.