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des collines aux profondeurs des vallées. On entend tous les dix ou quinze pas le bruit sec de leurs baisers et quelques éclats de voix criarde de fille lutinée : ah ! finis donc !chien d’homme ! — ou bien… t’as pas ja fini tes bêtises ?… — Ils se sont assis mainte- nant de nouveau, arrachant par maintien des brindilles d’herbe : elle, l’œil égaré et distrait, écoutant, avec émoi, si personne ne vient au loin dans le chemin ; mais lui la happe soudain convulsivement aux lèvres avec des salivations de dogue qui mâtine une levrette et la renverse dans ses crispations pour la seconde fois. — Ce n’est plus le Colin des opérascomiques, le Jeanniot des romances à sous-entendus polissons, c’est l’étalon dans la libre campagne qui, sans ménagement, se rue aveuglément à la chair.

Pour la pauvresse, c’est le bel âge que cet âge des amours brutales, puissantes, farouches et des ruts subis. Si le père a du bien, elle se marie un beau matin avec l’un de ses amoureux qui a jugé de sa robustesse, des services qu’elle lui pourra rendre et qui l’épouse en finaud, pour avoir un ouvrier solide à atteler à sa vie. — A dater de ce jour, tout est fini pour elle ; courbée par le travail, tirant sur le trait comme un cheval aveugle, déformée par les couches, elle n’a plus de fête ni de répit. Les mômes arrivent qu’il faut nourrir et élever comme on peut ; ce n’est plus la femme fraîche et appétissante, la rose donzelle délurée de la veille, qu’on rencontrait