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UN ÉTÉ À LA CAMPAGNE


Protége-moi, déesse, exauce ma prière ;
Fais que ce bel enfant n’entr’ouvre la paupière
Qu’après m’avoir permis de lui prendre un baiser ;
S’il ne s’éveille pas, s’il me laisse poser
Une main sur son corps charmant, deux tourterelles
Seront sa récompense, et parmi les plus belles
Je m’engage à choisir. »

                                      Le bel adolescent
À mes vœux aussitôt se montre obéissant ;
Il ne bouge, et j’obtiens une faveur légère
Qui grandit mes désirs, loin de les satisfaire ;
Mais en homme prudent, je n’allai pas plus loin
Pour le moment, et quand je fus levé, j’eus soin
De courir tout d’abord chercher la récompense
Qu’attendait mon disciple avec impatience.

Je fus encouragé par cet heureux début,
Et, dès la nuit suivante, allant tout droit au but :
« Si tu permets, Vénus, qu’à mon aise je touche
Ce beau corps, m’écriai-je, et si dans cette couche
Je parviens à cueillir la palme de l’amour,
Je fais ici serment, dès que viendra le jour,
D’acheter un cheval à mon docile élève. »

L’enfant affriandé n’attend pas que j’achève,
Et de moi s’approchant, il semble m’inviter
À livrer le combat. Je cesse d’hésiter,