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la question de préséance ; on ne dîna pas pour ne pas enfreindre le protocole. Les Anglais d’ailleurs prennent toujours la précaution de manger chez eux lorsqu’ils sont invités à dîner, car ils se méfient du tour ; ils devraient bien avertir les étrangers qui donnent en plein dans le panneau.

Naturellement, ce dîner manqué ne fut une surprise pour aucun de nous, qui connaissions ces louables habitudes anglaises ; mais Hastings, qui n’était pas initié à ce genre de facétie, trouva la plaisanterie de fort mauvais goût.

Nous offrîmes nos bras aux charmantes invitées pour nous diriger vers la salle à manger : là, les discussions commencèrent. Le duc de Shoreditch réclama pour lui la préséance et la présidence de la table, alléguant sa qualité de délégué du roi ; il devait avoir le pas sur un ministre qui ne représente, somme toute, que la nation.

Je ne cédai pas, bien décidé à maintenir mes droits : dans tous les journaux mondains, je prenais rang avant les ducs, à l’exception de ceux de la famille royale. J’avais donc le pas aujourd’hui sur le duc de Shoreditch et je m’empressai de le faire observer.

La discussion dura tant et si bien qu’il fut impossible de trancher la question ; nous avions