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service du pont. Quand je descendis à terre sur le sol anglais, mes vêtements étaient en loques et complètement usés ; pour toute fortune, j’avais un dollar en poche qui me permit de ne pas mourir de faim le premier jour ; je passai le jour suivant sans manger et sans abri.

Le troisième jour, vers dix heures du matin, exténué et mourant de faim, je me traînais péniblement dans Portland Place, lorsque je croisai un bébé qui donnait la main à sa gouvernante ; à deux pas de moi il laissa tomber dans la rigole une magnifique poire à laquelle il avait donné un petit coup de dent. La vue de ce fruit souillé de boue n’en excita pas moins ma convoitise ; je la dévorais des yeux ; l’eau me vint à la bouche et mon estomac fit entendre à ce moment un appel désespéré. Je mourais d’envie de ramasser cette poire, mais toutes les fois que j’esquissais le mouvement de me baisser, je rencontrais le regard indiscret d’un passant ; alors, me sentant pris de honte, je faisais semblant de ne même pas songer à cette poire. Mon supplice se prolongea si bien que, finalement, je dus renoncer à ramasser ce fruit. Au moment où mon désespoir était à son comble et où j’allais transiger avec le sentiment de honte qui me retenait, une fenêtre s’ouvrit derrière moi et je m’entendis