Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/348

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

George. Tu n’as pas bien mené ta barque, n’est-ce pas, mon garçon ?

— Non, mon oncle ; pas très-bien. J’aurais pu mieux faire.

— Personne n’est respecté sans argent, — personne. L’homme pauvre ne tient jamais le haut du pavé, — jamais. Et je crains fort que tu ne sois toute ta vie un pauvre diable.

— Alors, je me contenterai du bas du pavé.

— Mais pourquoi as-tu été si dur avec moi quand je voulais te la faire épouser ? Vois-tu maintenant ce que tu as fait ? Regarde-la, et pense à ce qu’elle aurait pu être. Regarde-toi, et pense à ce que tu aurais pu toi-même devenir ? Si tu m’avais écouté, tu aurais peut-être été mon unique héritier.

— Que voulez-vous, mon oncle, comme j’ai fait mon lit, il faut que je me couche. J’ai bien des causes de regret, — quoique votre argent n’y soit pour rien.

— Ah ! je savais bien que tu serais roide jusqu’au bout, s’écria M. Bertram, irrité de ne pouvoir arracher à son neveu une expression de regret au sujet des douze millions et demi.

— Suis-je roide, mon oncle ? En vérité, je n’avais pas l’intention de l’être.

— Non, c’est dans ta nature. Mais maintenant, à la dernière heure, nous n’allons pas nous quereller, n’est-ce pas, George ?

— J’espère bien que non, mon oncle. Nous ne nous sommes jamais querellés, que je sache. Vous m’avez