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avaient fait leurs paquets ; on avait fait circuler la liste de souscription pour la musique ; on avait bu à la santé du capitaine à la fin du dîner, et l’on s’occupait de préparer les boîtes aux dépêches dans l’entre-pont.

— Voilà ! tout sera bientôt fini, dit madame Cox en montant sur le pont, après dîner, tout enveloppée dans son manteau. Comme on a froid !

— Oui, ce sera bientôt fini, répondit Bertram. Quelle singulière vie que celle d’un voyage comme celui-ci ! Quelle intimité entre des gens qui ne se reverront jamais ensuite !

— C’est comme cela que ça finit, je pense. Oh ! monsieur Bertram…

— Que voulez-vous ?

— Hélas ! je ne sais. Le destin m’a toujours été contraire, et je pense qu’il en sera de même jusqu’au bout.

— N’est-ce pas qu’il fait froid ? dit Bertram en boutonnant son paletot,

— Bien froid, bien froid ! dit madame Cox. Mais il est quelque chose de plus froid que le temps — de bien plus froid.

— Vous êtes bien sévère, madame Cox.

— Ici, c’est madame Cox ; là-bas, quand nous étions devant Gibraltar, c’était Annie. Voilà ce que c’est que d’arriver. Je savais qu’il en serait ainsi. Je déteste jusqu’à l’idée de l’Angleterre. Et madame Cox porta son mouchoir à ses yeux.

En ce qui touchait Bertram, elle avait eu sa chance, et elle l’avait laissée échapper ; elle avait vu passer l’oc-