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d’esprit. Ces qualités avaient à peine suffi pour conquérir le cœur de Caroline. Il s’y était joint depuis une ferme volonté, un certain empire sur les hommes, et le don de se faire écouter du public. Or, la puissance et la volonté sont après tout ce que la femme apprécie le plus chez l’homme.

Depuis que Caroline avait perdu celui qu’elle aimait, elle s’avouait son amour. Ah oui ! elle l’aimait. Comment le reconquérir ? Ce fut là sa première pensée. Il n’y a aucun moyen de le reconquérir, fut la seconde. Le prier de revenir lui semblait chose impossible. Reviendrait-il jamais de son propre mouvement ? Cela, non plus, n’était pas possible. George avait le cœur tendre et un mot aurait suffi pour le ramener tant qu’ils avaient été là tous deux dans la même chambre ; mais il était aussi orgueilleux que tendre : fallût-il s’arracher le cœur, il ne reviendrait jamais sans qu’on l’en priât.

Pendant que mademoiselle Baker faisait son whist chez sa vielle amie, mademoiselle Waddington, renfermée dans sa chambre, s’efforçait ainsi, avec des pleurs amers et de terribles combats, de se résigner à la perte qu’elle venait de faire.