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était sans doute prête à l’épouser parce qu’elle s’y était engagée, mais il était évident qu’elle ne se souciait pas de lui. Il ne la forcerait pas à tenir sa promesse, et il ne presserait pas sur son cœur une femme capable d’avoir des confidences secrètes pour un autre homme.

Mademoiselle Baker, se disait-il encore, avait mal agi à son égard. Elle devait savoir ce qui se passait ; pourquoi ne le lui avait-elle pas dit ? Si Caroline lui préférait réellement un autre, mademoiselle Baker n’aurait-elle pas dû le prévenir ? Mais tout cela importait peu aujourd’hui ; il l’avait su à temps, heureusement, — oui, heureusement, — fort heureusement.

Se brouillerait-il avec Harcourt ? Qu’importait encore cela ? Pourquoi attacher de l’importance au rôle qu’avait joué son ami dans cette affaire ? Si Harcourt avait dit vrai, si cette lettre avait été montrée, il ne pardonnerait jamais cela à Caroline, et il se séparerait d’elle. Et s’il ne la possédait pas, que lui importait à qui elle appartiendrait ? Si elle aimait Harcourt, il ne chercherait pas à les séparer. Mais il y avait une chose dont il voulait s’assurer pleinement : il saurait si la lettre avait réellement été montrée. Harcourt était avocat ; or, dans les idées de Bertram, on ne devait pas se fier implicitement à la parole d’un avocat.

Il marchait toujours. Mais que faire ? Par où commencer ? Tout à coup il lui vint à l’esprit que, d’après les idées généralement reçues dans le monde, il ne serait pas justifié de rompre avec la femme qu’il devait épouser pour la seule raison qu’elle avait fait voir une de ses lettres à un autre. À ses yeux, cette cause était