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par conséquent, l’avocat déjà célèbre, et lui-même si prospère, crut bien faire en ne perdant pas de vue son ami.

Bertram avait renoncé à toute idée de plaider. Il comptait, pour la forme, se faire recevoir avocat, mais il avait résolu d’embrasser la profession d’écrivain. Il entreprit une foule d’ouvrages : des poëmes, des pièces de théâtre, des pamphlets politiques, des essais irréligieux, des histoires, et une relation de son voyage en Orient. Il prétendait qu’il n’y a en Angleterre que deux occupations dignes d’un Anglais. Il fallait, selon lui, être un homme politique, ou un écrivain. Quand on sent que l’on a quelque chose en soi, disait-il, il faut le dire au monde de façon à ce que chacun l’entende. Cela peut se faire au monde de la parole ou de la plume, en entrant au Parlement ou en restant dans son cabinet. Ces deux moyens de se faire entendre ont chacun leurs avantages. Le sort, qui avait fait de Harcourt un membre du Parlement, semblait avoir destiné Bertram à être un écrivain.

Bien qu’à cette époque Harcourt fût accablé de besogne, il trouvait moyen de se rencontrer souvent avec Bertram, et chaque fois qu’il le voyait seul, il s’efforçait de parler de mademoiselle Waddington.

Bertram paraissait toujours un peu redouter ce sujet de conversation. Il n’avait pas blâmé Harcourt pour ce qui s’était passé pendant son absence à Paris, mais depuis cette époque il ne lui avait jamais, le premier, parlé de ses projets de mariage.

Par une belle soirée de mai, les deux amis se trou-