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Tout ceci se savait fort bien à Littlebath. Bertram ne cherchait aucunement à le cacher ; à vrai dire, il ne savait rien dissimuler, et dans ce cas-ci il mettait un orgueil tout particulier à faire comprendre à Caroline l’étendue du mal qu’elle avait causé.

Quelquefois la tante et la nièce se demandaient si George n’avait pas renoncé au barreau comme profession. Il ne leur avait jamais rien dit de pareil, et son intention était encore de se faire recevoir avocat ; mais il ne suivait plus aucune éducation légale. Il avait quitté le cabinet de M. Die, et à Littlebath on ne l’ignorait pas.

Il avait d’autres occupations, avait-il dit, et c’était la vérité. Durant les premiers six mois de sa colère il avait trouvé des charmes à l’oisiveté ; mais l’oisiveté ne pouvait lui convenir longtemps, et il s’était mis à faire un livre. L’œuvre fut publiée sans nom d’auteur, mais George laissa savoir à Littlebath qu’elle était de lui, et je ne sais qui le dit aussi à Oxford. Le livre, — un tout petit livre, — était de nature à plaire à ses amis de Littlebath aussi peu qu’à ses amis d’Oxford. À Littlebath, il fit dresser les cheveux sur la tête de mademoiselle Baker ; à Oxford, il fut cause que les orthodoxes se demandèrent s’il ne serait pas opportun de prier M. George Bertram de donner sa démission d’agrégé.

Le livre en question portait un titre épouvantable : Le roman dans la Bible. Dans son premier chapitre, George allait au-devant de l’accusation que le monde, dans son injustice, ne manquerait pas de porter contre