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sont faits pour être dits ; mais ces autres secrets qui dessèchent le cœur au lieu de le rafraîchir comme une rosée du ciel, les secrets comme ceux d’Adela, en les confie bien rarement.

— Et pourtant, Adela, il est possible que cela ne se fasse jamais. Ainsi parlait Caroline, le matin même du jour où Bertram devait arriver avec Harcourt. Elle savait à merveille que l’ami de Londres, l’homme du monde, devait être amené pour la juger, mais elle ne redoutait nullement son inspection. Elle n’était pas naturellement timide, et quoiqu’elle eût, ainsi que nous l’avons dit, à peine conscience du charme qu’elle possédait, elle ne se défiait jamais d’elle-même.

— Et pourquoi ce mariage n’aurait-il pas lieu ? Quelles folies me dites-vous là, Caroline ? Si réellement vous aviez cette idée-là, vous ne voudriez pas recevoir M. Bertram, ainsi que son ami, comme vous allez le faire.

— Je dis ce que je pense. Il est très-probable que cela ne se fera jamais. Je ne saurais vous expliquer, ma chère Adela, tous les replis de mon esprit et de mon cœur. Je n’épouserais pas un homme que je n’aime pas pour tous les trésors du monde.

— Et vous n’aimez pas M. Bertram ?

— Oui, je l’aime ; je l’aime parfois bien tendrement, mais je crains qu’un jour je n’en vienne à le moins aimer. Vous ne me comprenez pas ; mais la vérité, c’est que je l’aimerais mieux s’il était moins digne de mon affection — s’il était moins désintéressé.

— Non, je ne vous comprends pas, dit Adela, qui