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datait de si loin, qu’il l’appelait généralement mademoiselle Mary. Mais il ne savait pas — il ne soupçonnait même pas — la vérité au sujet de la naissance de mademoiselle Waddington, bien qu’à cet égard il se livrât volontiers à des conjectures. Elle était la nièce de la nièce de son patron, elle était la fille de feu M. Waddington, et elle possédait cent mille francs de fortune personnelle : M. Pritchett n’en savait pas davantage.

M. Pritchett se préoccupait beaucoup de l’héritage de son patron. Il voyait M. Bertram qui avait ses soixante-dix ans passés — lui, M. Pritchett, en avait déjà soixante-trois, — et personne ne savait qui serait son héritier. À vrai dire, M. Pritchett ne lui voyait pas d’héritier.

« M. George devrait hériter, » se disait-il, et la sollicitude que montrait M. Bertram à l’égard de son neveu, l’habitude qu’il avait adoptée volontairement de payer l’éducation de l’enfant et de faire une pension au jeune homme, tout semblait aboutir à cette conclusion. Mais, d’un autre côté, l’oncle aimait tant à dominer, et le neveu aimait si peu à se laisser dominer ! Si Waddington avait vécu, c’est lui qui aurait été l’héritier, sans contredit. Mademoiselle Waddington hériterait peut-être, ou bien encore mademoiselle Baker.

Ainsi se succédaient les conjectures dans l’esprit de M. Pritchett. Cependant, somme toute, dans cette course à l’héritage, George lui semblait tenir la corde.

Et maintenant, revenons pour tout de bon à notre histoire.