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Dont la douceur ne profitant de rien,
Donne du mal en promettant du bien.
Las ! mon Esprit ne ſçait point de figure
Pour exprimer la peine que i’endure,
Et ie croiray qu’on en puiſſe dreſſer
Dont le ſeul traict me la puiſſe effacer ?
Non non, pour moy, toutes ces ſympathies
Ne ſçauroient estre aſſez bien aſſorties ;
Et ce bel Art auec ſa vanité
Ne peut contraindre vne Diuinité.
Puis le Destin dont la ialouſe Enuie
Se rend contraire au bon-heur de ma vie,
Eſt trop puiſſant pour ne pas m’empeſcher
L’effect d’vn bien ſi ſenſible & ſi cher.
M’eſbloüiſſant de fauſſes apparances,
Il a touſiours trahy mes eſperances ;
Et n’a iamais ſatisfait mon deſir
De la douceur d’vn ſolide plaiſir.
Touſiours en moy la douleur, ou la crainte
Vient augmenter ma triſteſſe, ou ma plainte ;
Mais de repos & de contentement,
Ie n’en ay point ſi ce n’eſt en dormant.

Freſle Demon, morne Prince des Songes,
Qui n’entretiens l’Ame que de menſonges ;
Si c’eſt de toy de qui ie dois tenir
Tout le bon-heur qui me doit aduenir ;