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PIERRE QUI ROULE

Unis eut lieu cette année-là à Rutland, Vermont. Quéquienne avait été prié par le comité exécutif d’aller y traiter la question de la presse franco-canadienne. Il se prépara avec soin et se rendit à Rutland où il eut le plaisir de rencontrer les délégués de Fall River et d’autres anciens co-délégués de conventions où il avait figuré précédemment, une fois, entre autres en qualité de premier vice-président.

À Rutland, l’assistance était si nombreuse et le programme tellement surchargé que l’on décida tout d’abord de se dispenser d’entendre les longs discours préparés pour la circonstance. Exception fut faite, cependant, en faveur du major Mallet, un Canadien de Washington, écrivain catholique, dont les essais historiques, publiés dans des revues de langue anglaise, étaient hautement appréciés. M. Mallet, élevé dans un milieu exclusivement anglophone, ne s’était refrancisé qu’après avoir conquis ses grades dans l’armée américaine. Sa phrase française n’était pas toujours impeccable ; mais la profondeur de sa pensée était telle qu’on l’écoutait toujours avec plaisir.

Il y avait là d’autres orateurs, venus du Canada, qui n’avaient pas été officiellement invités, mais qui ne se crurent pas obligés d’écourter leurs discours. L’un d’eux prit même une bonne heure pour lire une longue dissertation qui dénotait une connaissance assez médiocre de l’état d’âme des Canadiens émigrés. Le temps qu’on avait cru épargner en élaguant les discours préparés sur demande, par des Canadiens qui avaient vécu de la vie des émigrés, fut employé à écouter les élucubrations de gens qui avaient passé leur vie à déplorer le prétendu manque de patriotisme des Canadiens chassés de leur pays natal, par l’incurie des propres chefs de ces orateurs d’occasion, nouvellement épris d’un tendre amour pour cette population restée française et catholique en dépit des sinis-