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PIERRE QUI ROULE

en avez là-bas) déclarait qu’il avait honte d’habiter la province de Québec, parce que les Canadiens-français ne s’enrôlent pas. Il ajoutait que lorsque les soldats orangistes reviendront de la guerre, il leur restera encore assez de combativité pour aller nettoyer Bourassa, Lavergne et tous les autres.

« Allons, les gens que vous tuez se portent à merveille. Il y a quarante ans, lorsque ma position de journaliste m’obligeait à lire les journaux anglais que nous recevions en échange, j’avais trop souvent l’occasion de lire de semblables aménités. Le ton n’a pas changé, et la province de Québec n’a pas été reconquise.

« Ces gens-là ont l’humeur bien égale : ils ont toujours l’écume à la bouche. De temps immémorial, ils occupent leurs loisirs à se surexciter pour se préparer à pourfendre les Canadiens-français. Ils sont l’immense majorité et ils se battent continuellement les flancs afin d’avoir, au besoin, le courage de se défendre contre une minorité qui, loin de songer à les attaquer, ne daigne même pas se défendre contre leurs incessantes et furibondes attaques.

« Une société fondée dans l’unique but d’entretenir la haine contre une population paisible ne serait pas tolérée ailleurs. — Ici, elle fait la pluie et le beau temps.

« Sir Sam Hughes a déjà rendu hommage au patriotisme de notre race. Il faut à ces perturbateurs atteints de francophobie chronique et invétérée, un prétexte quelconque pour justifier leur raison d’être. Attendons avec calme le jour où ces foudres de guerre entreprendront d’introduire le Kultur boche dans les paisibles campagnes de la province de Québec. »

Avant son départ pour le Canada, le 16 février 1886, les Canadiens de Fall River donnaient une fête d’adieu au rédacteur de l’Indépendant. On avait même fait souscrire Quéquienne en lui disant qu’il s’agissait