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PIERRE QUI ROULE

« D’abord, on nous dit que les Français méritent d’être châtiés pour leur impiété. Mais, sont-ils donc plus impies que les Prussiens ou que n’importe quel peuple ? Il y a malheureusement beaucoup d’impies en France ; mais quel est le pays aussi populeux que la France où il n’y en a pas au moins autant ? L’impiété est une contagion qui se répand malheureusement dans tous les grands centres ; s’il y a de l’impiété en France, il y a aussi là beaucoup de religion, et pensez-vous, en bonne foi, que Dieu punirait toute une nation pour les fredaines de quelques écervelés ?

« D’ailleurs, si vous considérez la France dans sa politique vis-à-vis des autres nations, vous verrez qu’elle a plus fait que toute autre pour s’attirer les faveurs du Ciel. L’a-t-on jamais vu essayer d’écraser les faibles, ou ne l’a-t-on pas toujours vu prendre le parti du faible contre le fort, du droit contre la force ?

« Et d’ailleurs, si la France ne méritait que la réprobation, verrait-on tout le clergé catholique (le clergé de Woonsocket excepté) s’empresser de lui venir en aide ? Voyons ce que le clergé français en pense, lui qui doit être à portée de s’y connaître. Voyons ce que dit la lettre suivante adressée à la Gironde par un curé du département de l’Ain :

« Au rédacteur — Suprême appel aux armes.

« L’heure presse ; la patrie est en danger. Depuis trop de jours, hélas ! un ennemi impie piétine sur le cœur de notre mère palpitante ! Aux armes donc tous ! Et nous, prêtres, ministres de paix en temps ordinaire, soyons ministres de guerre aujourd’hui. Dieu le veut : Fermons les portes de nos églises. Descendons nos cloches pour fondre des canons. Hissons au haut de nos tours sacrées l’étendard noir