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soulevé en l’air. C’était magnifique ! Je crois vraiment qu’un chêne n’y aurait pas résisté !

— C’est méritoire ! répondit le prêtre, ne sachant trop comment couper court à l’extase du vieillard.

Un paysan du voisinage amena un jour à Vassili Ivanovitch son frère qui avait le typhus. Le malheureux était étendu expirant sur une botte de paille ; des taches noirâtres couvraient tout son corps ; il était sans connaissance depuis longtemps. Vassili Ivanovitch regretta qu’on n’eût pas songé plus tôt à demander pour ce malheureux les secours de la médecine, et déclara qu’il n’y avait aucune possibilité de le sauver. Effectivement, le paysan ne put être ramené chez lui ; il expira en route dans sa téléga.

Deux ou trois jours après Bazarof vint trouver son père et lui demanda s’il n’avait pas de la pierre infernale.

— Oui ; mais que veux-tu en faire ?

— J’en ai besoin pour cautériser une petite plaie.

— Qui est-ce qui s’est blessé ?

— C’est moi.

— Comment ! toi ? Quelle est cette plaie ? Montre-la moi.

— Tiens, c’est sur ce doigt. Je me suis rendu ce matin dans le village d’où l’on nous avait amené ce paysan qui est mort du typhus. Je ne sais pourquoi on voulait faire son autopsie… Il y a longtemps que je ne m’étais livré à ce genre d’opération.

— Eh bien ?