Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/239

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Oh ! Nicolas Petrovitch ! Mais avant d’arriver à l’étang je serais morte, ou je mourrais en revenant. Vous savez bien qu’il n’y a pas d’ombre dans le jardin.

— C’est vrai, répondait Kirsanof en se frottant le front.

Un matin, il était près de sept heures, Bazarof, qui revenait de la promenade, trouva Fenitchka dans le bosquet de seringat, depuis longtemps défleuri, mais encore frais et vert. Elle était assise sur le banc, la tête couverte d’un mouchoir blanc ; à ses côtés se trouvait un tas de roses blanches et rouges toutes couvertes de rosée. Il lui souhaita le bonjour.

— Ah ! Eugène Vassilitch ! lui dit-elle en levant un peu le coin du mouchoir pour le regarder, et dans ce mouvement son bras se découvrit jusqu’au coude.

— Que faites-vous là ? répondit Bazarof en s’asseyant auprès d’elle ; des bouquets ?

— Oui, pour mettre sur la table lorsqu’on déjeunera. Nicolas Petrovitch aime beaucoup cela.

— Mais on ne déjeunera pas de sitôt. Quelle quantité de fleurs !

— Je viens de les cueillir, avant que la chaleur ne m’empêche de sortir. On ne peut respirer qu’à cette heure-ci. Je n’en peux plus de la chaleur ; je crains d’en tomber malade.

— Quelle idée ! Donnez-moi le bras, que je vous tâte un peu le pouls.

Bazarof lui prit la main, plaça le doigt sur l’artère fine et bien cachée sous une peau douce et moite, et