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— Ah ! Vassili Ivanovitch, répondit la vieille au milieu de ses sanglots. Dire que le voilà, notre Eniouchenka, notre pigeon chéri ! — Et tout en continuant à le tenir embrassé, elle éloigna de Bazarof sa figure mouillée de larmes, le regarda d’un air comiquement heureux, puis elle se serra de nouveau contre lui.

— Oui, sans doute, tout cela est dans la nature des choses, reprit Vassili Ivanitch, seulement, il vaudrait mieux entrer dans la maison. Eugène nous a amené un visiteur. Excusez-nous, ajouta-t-il, en s’adressant à Arcade avec un léger salut. Vous comprenez, faiblesse de femme… d’ailleurs, le cœur d’une mère…

Tandis qu’il parlait ainsi, il était tellement ému lui-même que ses lèvres, ses sourcils et son menton en tremblaient,… mais il s’efforçait visiblement de garder son sang-froid et même de se donner un air indifférent.

Arcade s’inclina.

— Allons, ma mère, lui dit Bazarof, entrons. Et il conduisit la bonne vieille tout éplorée dans le salon. L’ayant assise dans un fauteuil commode, il embrassa encore une fois rapidement son père, et lui présenta Arcade.

— Enchanté de faire votre connaissance, répondit Vassili Ivanitch, mais ne soyez pas difficile ; tout est ici sans aucune prétention, sur le pied militaire. Arina Vlassievna, calmez-vous au nom du ciel, faites-moi ce plaisir ; quel manque de courage ! notre honorable hôte aura de vous une pauvre idée.