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aurait pouvoir de tout ce qu’elle veut ; mais on est satisfait dès l’instant qu’on y renonce. Sans elle, on ne peut être content. La vraie et unique vertu est donc de se haïr, car on est haïssable par sa concupiscence, et de chercher un être véritablement aimable, pour l’aimer. Mais, comme nous ne pouvons aimer ce qui est hors de nous, il faut aimer un être qui soit en nous, et qui ne soit pas nous, et cela est vrai d’un chacun de tous les hommes. Or, il n’y a que l’être universel qui soit tel. Le royaume de Dieu est nous (Luc, XVII, 21) ; le bien universel est en nous-mêmes et ce n’est pas nous. PASCAL.

IV. — Le vrai amour envers les hommes n’est possible que par l’abnégation.

1. Seul ce qui ne vit pas pour soi-même ne périt pas. Mais pourquoi celui qui ne vit pas pour lui-même vivra-t-il ? On peut ne pas vivre pour soi-même alors seulement qu’on vit pour Tout. C’est en vivant pour le Tout que l’homme peut être et est tranquille. LAO-TSEU.

2. Quand même tu le voudrais, tu ne pourrais pas séparer ta vie de celle de l’humanité. Tu vis dans l’humanité, par elle et pour elle. En vivant parmi les hommes, tu ne peux pas ne pas renoncer à toi-même, parce que nous sommes tous créés pour agir d’un commun accord, comme les jambes, les bras, les yeux, et l’accord ne serait pas possible sans l’abnégation. MARC-AURÈLE.