Page:Tolstoi - La Pensée de l’humanité.djvu/301

Cette page n’a pas encore été corrigée

en raison de ce fait qu’elle nous indique ce qui empêche l’amour. C’est précisément cet effort intellectuel contre ce qui empêche l’amour qui est plus important et plus nécessaire que tout le reste.

3. Si l’homme n’avait pas la faculté de réfléchir, il ne comprendrait pas pourquoi il vit. Et s’il ne le comprenait pas, il n’aurait pu savoir ce qui est bien et ce qui est mal. C’est pourquoi il n’y a rien de plus cher à l’homme que de savoir penser.

4. Les hommes envisagent les doctrines morales et religieuses, d’une part, et la conscience, de l’autre, comme deux guides différents. En réalité, il n’y a qu’un seul guide : la conscience, c’est-à-dire, la reconnaissance de la voix de Dieu qui vit en nous. Cette voix décide indubitablement pour chaque homme ce qu’il doit ou ne doit pas faire ; et chaque homme peut toujours évoquer cette voix par un effort de pensée.

5. Si l’homme ne savait pas que ses yeux pouvaient voir et s’il ne les ouvrait jamais, il aurait été très misérable. De même, et plus encore, est misérable l’homme qui ne comprend pas que la faculté de penser lui est donnée pour supporter tous les malheurs. Si l’homme est raisonnable, il lui sera facile de les supporter ; d’abord, parce que sa raison lui dira que tous les malheurs passent et se transforment en bonheur, et ensuite, que chaque malheur est utile à un homme raisonnable. Et pourtant, au lieu de regarder le malheur en face, les hommes tâchent de l’éviter. Ne serait-il pas préférable de nous réjouir de ce que Dieu nous ait donné la faculté de ne pas nous chagriner de