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Mais les hommes qui ne veulent pas suivre la doctrine du Christ, comprennent volontairement ou non, la doctrine du Christ non pas comme il l’a prêchée — rapprochement continu vers la perfection — mais comme une règle conformément à laquelle le Christ exigerait des hommes la perfection divine. Et en interprétant aussi faussement la doctrine du Christ, ceux qui ne veulent pas la suivre adoptent l’une de ces deux attitudes : ou bien, considérant la perfection comme inaccessible (ce qui est parfaitement juste), ils rejettent toute la doctrine comme un rêve irréalisable, ou bien, attitude la plus nuisible et la plus générale, tout en reconnaissant la perfection comme inaccessible, ils corrigent c’est-à-dire, dénaturent la doctrine et observent des règles que l’on appelle chrétiennes, mais qui sont, pour la plupart, contraires, au christianisme.

9. L’idée de l’union des chrétiens, comme une réunion des élus, des meilleurs, est une idée anti-chrétienne présomptueuse et fausse. Quel est le meilleur, quel est le plus mauvais ? Pierre était le meilleur avant que le coq chantât, et le brigand était le plus méchant avant la croix. Ne connaissons-nous pas en nous-mêmes tantôt l’ange, tantôt le diable, qui se mêlent si bien à notre vie, qu’il n’y a pas d’homme qui aurait complètement chassé l’ange, ni qui aurait laissé apparaître le diable derrière l’ange. Comment pouvons-nous, nous qui sommes des êtres si complexes, former la réunion des élus, des justes ?

Il y a une lumière de vérité, et il y a ceux qui s’approchent d’elle de tous côtés ; d’autant de côté qu’il y a de rayons dans un cercle, c’est-à-dire par des routes infiniment variées. Tâchons de toutes nos forces d’arriver à la lumière de la vérité qui nous unit tous, et ce n’est pas à