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ses, aux contes de fées, etc., les hommes ont longtemps refusé d’attacher de l’importance ; et c’est par occasion seulement que les grands éducateurs de l’humanité se sont arrêtés à censurer certaines manifestations de cet art profane, quand ils les jugeaient opposées aux conceptions religieuses de leur temps.

C’est ainsi que les sages anciens, Socrate, Platon, et Aristote, ont entendu l’art. Ainsi l’ont entendu les prophètes hébreux et les premiers chrétiens ; ainsi l’entendent aujourd’hui encore les mahométans ; et ainsi l’entend le peuple, dans nos villages russes. Il s’est même trouvé des éducateurs de l’humanité, Platon, par exemple, et des nations entières, comme les mahométans et les bouddhistes, pour dénier à tout art le droit d’exister.

Et sans doute ces hommes et ces nations avaient tort de condamner tout art, car c’était vouloir supprimer une chose impossible à supprimer, un des moyens de communication les plus indispensables entre les hommes. Mais leur erreur était moins grande encore que celle que commettent aujourd’hui les Européens civilisés, en favorisant tous les arts à la seule condition qu’ils produisent de la beauté, c’est-à-dire qu’ils procurent du plai-