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d’Hugo, de Dostoïewsky, les peintures de Millet, Bastien-Lepage, Jules Breton et autres) ; d’autre part, il y a aujourd’hui des artistes qui essaient d’exprimer des sentiments aussi généraux, aussi universels que possible. Le nombre de ces artistes est encore très restreint, mais on paraît commencer déjà à se rendre compte de leur utilité. Je dois ajouter que, dans ces derniers temps, on a multiplié les tentatives d’entreprises artistiques populaires, éditions de livres, concerts, théâtres, musées, etc. Tout cela est encore très loin de ce qui devrait être ; mais déjà on peut discerner la direction suivant laquelle l’art va marcher, pour rentrer enfin dans la voie qui lui est propre.

La conscience religieuse de notre temps s’est déjà sensiblement éclaircie ; et il suffirait désormais aux hommes de rejeter la fausse théorie de la beauté, qui fait du plaisir le seul objet de l’art, pour qu’aussitôt cette conscience religieuse pût prendre librement en main la conduite de l’art.

Et le jour où la conscience religieuse, qui commence déjà à diriger inconsciemment la vie des hommes, le jour où elle sera reconnue d’eux en pleine conscience, on verra aussitôt disparaître spontanément la séparation de l’art en art des