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le bonheur des hommes que dans l’union et la fraternité.

Inconsciemment, cette vérité se fait jour par l’établissement de nouvelles voies de communication, le télégraphe, le téléphone, la presse, toutes inventions tendant de plus en plus à mettre un lien entre tous les hommes ; consciemment elle se manifeste par la disparition des superstitions qui séparaient les hommes, par l’expression de la fraternité idéale, et aussi par les quelques œuvres d’art de notre temps qui sont bonnes et vraies.

L’art est un organe moral de la vie humaine, et, comme tel, ne saurait être complètement détruit. Aussi, malgré tous les efforts des hommes des classes supérieures pour nous cacher l’idéal religieux dont vit l’humanité, cet idéal devient-il de plus en plus clair pour les hommes, et trouve-t-il de plus en plus souvent l’occasion de s’exprimer, au milieu même de notre société pervertie, tant dans la science que dans l’art. L’art lui-même, en effet, commence à distinguer le véritable idéal de notre temps, et à se diriger vers lui. D’une part, les meilleurs ouvrages des artistes contemporains expriment des sentiments d’union et de fraternité entre les hommes (ainsi les écrits de Dickens,