hommes auraient pu l’anéantir, lui et des milliers de ses pareils. Il comprend aussi que Bouddha, Socrate, et le Christ aient été grands, parce qu’il sent et sait que lui et tous les hommes devraient ressembler à ceux-là. Mais comment un homme peut être grand pour avoir écrit des vers sur l’amour des femmes, c’est ce qu’en aucune façon il ne peut comprendre.
Et le même effarement doit se produire dans le cerveau d’un paysan breton ou provençal, quand il apprend qu’on va élever un monument, une statue, comme on en élève à la Sainte Vierge, qu’on va l’élever à Baudelaire, l’auteur des Fleurs du Mal, ou à Verlaine, un débauché qui a écrit des vers incompréhensibles. Et quel désarroi doit se produire dans le cerveau des gens du peuple quand ils apprennent que la Patti ou la Taglioni reçoivent cent mille francs pour une saison, que des peintres reçoivent cent mille francs pour un seul tableau, et qu’il y a des auteurs de romans qui gagnent la même somme parce qu’ils savent décrire des scènes d’amour !
Et la même chose se passe dans le cerveau des enfants. Je me rappelle avoir, jadis, éprouvé moi-même cette stupeur et ce désarroi. C’est là une