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pas de meules et si les chevaux s’arrêtent, ce qui ne va pas tarder, semble-t-il ? Nous gèlerons tous. »

Je vous avoue que, malgré un peu de peur, le désir de voir se produire quelque chose d’extraordinaire et d’un peu tragique était en moi plus intense que cette peur. Il me semblait que ce ne serait pas mal si, vers le matin, les chevaux nous avaient d’eux-mêmes entraînés dans quelque village inconnu et lointain, à demi-gelés, ou même quelques-uns de nous tout à fait gelés. Et, dans ce sens, mes rêves, avec une clarté, une rapidité étranges, défilaient devant moi.

Les chevaux s’arrêtent. La neige nous envahit de plus en plus, et voilà qu’on ne voit plus de notre attelage que la douga et les oreilles des chevaux. Mais tout à coup Ignachka surgit de la neige avec sa troïka, et passe