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dans le sens de juger le prochain sur paroles — surgit une difficulté : Comment ne pas juger ? On ne peut pas ne pas blâmer le mal, et en conséquence tous les commentaires tournent sur un point : qu’est-ce qui est blâmable et qu’est-ce qui ne l’est point. Les uns disent que, pour les serviteurs de l’Église, cela ne peut pas être expliqué dans le sens de défense de blâmer, que les apôtres eux-mêmes blâmaient (Chrsysostôme, Théophilacte). Les autres disent que, sans doute, Jésus avait voulu désigner par cette parole les Juifs, qui accusaient le prochain de peccadilles et commettaient eux-mêmes de gros péchés.

Mais nulle part un mot des institutions humaines, — des tribunaux pour dire dans quelle situation ils se trouvent par rapport à cette défense de juger. Jésus les admet-il ou non ? À cette question si naturelle — point de réponse, comme s’il était trop évident que, du moment qu’un chrétien se met dans un fauteuil de juge, il peut non seulement juger le prochain, mais le condamner à mort.

Je m’adresse aux écrivains grecs, catholiques, protestants, à ceux de l’école de Tübingen et de l’école historique.

Partout, même chez les commentateurs les plus émancipés, — ces paroles sont interprétées comme défense de médire.

Mais pourquoi donc ces paroles, contrairement à l’esprit de toute la doctrine de Jésus, sont-elles interprétées dans un sens si étroit, que la défense de juger en justice n’est pas comprise dans la défense de juger ? Pourquoi la supposition que Jésus en défendant la médisance envers le prochain, par légèreté, comme une mauvaise