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sait et je ne puis plus me laisser dominer par elle. Je sais maintenant que la cause principale de cette tentation n’est pas le besoin naturel de rapports sexuels, mais l’abandon des femmes par leurs maris et des maris par leurs femmes. Je sais maintenant que l’abandon de l’homme par la femme et de la femme par l’homme unis une fois pour toutes est précisément ce divorce que Jésus interdit aux hommes, parce que les hommes et les femmes abandonnés par leur premier compagnon sont la cause première de toute débauche dans le monde.

En me souvenant de ce qui me portait à la débauche, je vois qu’outre l’éducation sauvage qui, physiquement et intellectuellement, développait en moi la passion érotique que le monde justifie par toutes les subtilités de l’esprit, le piège principal auquel je succombais était l’abandon de la femme avec laquelle je m’étais uni pour la première fois et la situation des femmes abandonnées qui m’entouraient de toutes parts. Je vois maintenant que la force principale de la tentation se trouvait, non pas dans les désirs charnels, mais dans la non-satisfaction de ces désirs chez les femmes et les hommes abandonnés qui m’entouraient de toutes parts. Je comprends maintenant les paroles de Jésus : « Dieu au commencement fit l’homme, — mâle et femelle, en sorte que deux deviennent une seule chair, et par conséquent l’homme ne peut et ne doit pas séparer ce que Dieu a joint. » Je comprends maintenant que la monogamie est la loi naturelle de l’humanité, qui ne peut pas être violée impunément. Je comprends maintenant parfaitement les paroles qui disent que celui des époux qui se sépare de son compagnon avec lequel il s’est uni dès le com-