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mais parce qu’elle seule donne ces règles de la vie sans lesquelles l’humanité n’a jamais pu et ne peut pas vivre, sans lesquelles nul être humain n’a vécu et ne peut vivre, s’il veut vivre comme un homme, c’est-à-dire de la vie raisonnable.

La puissance de la doctrine de Jésus n’est pas dans son explication du sens de la vie, mais dans la doctrine qui règle la vie. La doctrine métaphysique de Jésus n’est pas neuve, c’est toujours la même doctrine de l’humanité qui est inscrite dans le cœur des hommes et qui a été prêchée par tous les vrais sages du monde. Mais la force de la doctrine de Jésus est dans l’application de cette doctrine métaphysique à la vie.

La base métaphysique de l’ancienne doctrine des Hébreux et celle de Jésus est la même : l’amour de Dieu et du prochain. Mais l’application de cette doctrine à la vie est très différente s’il s’agit de Moïse ou de Jésus. D’après la loi de Moïse, comme l’entendaient les Hébreux, pour l’appliquer à la vie, il fallait remplir six cent treize commandements, souvent absurdes, cruels, et qui tous se basaient sur l’autorité des Écritures. D’après la loi de Jésus, la doctrine de la vie, qui découle de la même base métaphysique, est formulée en cinq commandements raisonnables et bienfaisants, renfermant en eux-mêmes leur sens et leur justification, et enveloppant toute la vie humaine.

La doctrine de Jésus ne peut pas ne pas être acceptée par un juif, un disciple de Confucius, un bouddhiste, un mahometan sincère, qui serait arrivé à douter de la vérité de sa religion ; encore moins peut-elle ne pas être acceptée par les hommes de notre monde chrétien, qui n’ont maintenant aucune loi morale.