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blant dont les paysans sont surchargés, non pas par leur faute, mais grâce à l’injustice du sort qui leur est fait, vous trouverez chez les uns hommes et femmes bien portants, chez les autres hommes et femmes de plus en plus maladifs. Énumérez dans votre mémoire les richards et leurs femmes que vous connaissez et que vous avez connus, et vous verrez que la majorité se compose de malades. Parmi eux, un homme bien portant qui ne se traite pas constamment et périodiquement, en été, est une exception tout aussi rare qu’un malade dans la classe des ouvriers. Tous ces favoris de la fortune commencent par l’onanisme, qui est devenu dans leurs mœurs une condition naturelle du développement. — Ils sont tous « édentés », grisonnants ou chauves à un âge ou l’ouvrier commence à prendre toute sa vigueur. Presque tous sont affligés de maladies de nerfs, de l’estomac ou des parties génitales provenant d’excès de table, d’ivrognerie, de luxure ou de médicamentation perpétuelle ; et ceux qui ne meurent pas jeunes passent la moitié de leur existence à se traiter, à s’injecter de la morphine, et deviennent de malheureux perclus ne pouvant subsister par eux-mêmes et menant une existence de parasites comme ces fourmis qui sont nourries par des esclaves. Dressez une liste de leurs morts : l’un se brûle la cervelle, l’autre tombe en pourriture à la suite de la syphilis ; un vieux se tue à force de prendre des excitants, un jeune en se faisant rosser pour réveiller la volupté ; l’un est rongé par les poux, l’autre par les vers ; ceux-là succombent à force de libations, ceux-ci à force de gloutonnerie, d’autres par abus de morphine ou à la suite d’un avortement artificiel. Les uns après les autres, ils périssent victimes de la doc-