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en grec ni en hébreu, parce que la conception qui correspond à ce mot n’existait pas. Pour exprimer en grec ou en hébreu l’idée de la résurrection, il faut employer une périphrase, il faut dire « s’est levé, ou s’est réveillé d’entre les morts. » Ainsi, Matth., xiv, 2, où il est question d’Hérode, qui croyait que Jean-Baptiste était ressuscité, nous lisons « réveillé d’entre les morts, » αὐτὸς ἠγέρθη ἀπὸ τῶν νεκρῶν. Pareillement chez Luc, xvi, 31, dans la parabole de Lazare où il est dit que, quand même quelqu’un serait ressuscité, on ne croirait pas à un ressuscité, — nous lisons la périphrase « si quelqu’un d’entre les morts se levait » ἐάν τις ἐκ νεκρῶν ἀναστῇ. Mais, dans les passages où les mots « d’entre les morts » ne sont pas ajoutés aux mots « s’est levé » ou s’est « réveillé, » ces derniers mots ne peuvent jamais signifier ressusciter. Quand Jésus parle de lui-même, il n’emploie pas une seule fois les mots « d’entre les morts » dans tous les passages que l’on cite à l’appui de l’affirmation que Jésus aurait prédit sa résurrection.

Notre conception de la résurrection est à tel point étrangère à l’idée des Hébreux sur la vie, qu’on ne peut même pas se figurer comment Jésus aurait pu leur parler de résurrection et d’une vie éternelle, individuelle, qui serait le partage de chaque homme. L’idée de la vie future éternelle ne nous vient ni de la doctrine judaïque ni de celle de Jésus. Elle nous vient d’autre part. Quelque étrange que cela paraisse, on ne peut s’empêcher de dire que la croyance à une vie future est une conception très basse et très grossière, fondée sur une idée confuse de la ressemblance du sommeil et de la mort, idée commune à tous les peuples sauvages.

La doctrine hébraïque (et à plus forte raison la doc-