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qu’elle devrait être, et cette conception repose bien sur le même fondement que celle des croyants.

Il est vrai que les sceptiques, qui prétendent ne croire à rien, ne croient ni à Dieu, ni à Jésus-Christ, ni à Adam ; mais ils croient à la thèse fondamentale, qui est la base de leur fausse conception, — aux droits de l’homme à une vie de béatitude, — encore bien plus fermement que les théologiens.

La science et la philosophie ont beau se donner comme les arbitres et les guides de l’esprit humain, elles n’en sont que les servantes. La religion leur fournit une conception de la vie toute prête et la science ne fait que travailler dans le sillon tracé par la religion. La religion révèle le sens de la vie et la science ne fait que l’appliquer aux différentes circonstances qui se produisent. C’est pourquoi, quand la religion a faussé le sens de la vie humaine, la science élevée sur cette base ne peut que mettre en œuvre ces mêmes conceptions fantastiques.

Suivant la doctrine de l’Église, les hommes ont droit au bonheur, et ce bonheur n’est pas le résultat de leurs efforts, mais de causes extérieures. Cette conception est devenue la base de toute notre science et de notre philosophie.

Notre religion, notre science, notre opinion publique, font chorus pour nous dire que la vie telle que nous la menons est mauvaise, et en même temps elles affirment que la doctrine qui nous enseigne comment on peut réussir à devenir meilleur et à améliorer ainsi sa vie est une doctrine impraticable.

La doctrine de Jésus qui nous fournit un moyen raisonnable d’améliorer notre vie par nos propres forces