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Elle est nuisible et dangereuse parce qu’avec cette constitution tout le mal dont souffre la société, non seulement ne diminue pas, mais au contraire augmente et s’affermit. Il augmente et s’affermit parce que ou il se justifie, ou il revêt des formes attrayantes, ou il se cache.

Tout ce prétendu bien-être des peuples appartenant aux États soi-disant bien organisés, qui se soutiennent par la violence, n’est qu’une apparence, qu’une fiction. Tous ceux qui peuvent détruire la beauté extérieure : les affamés, les malades, les dépravés, sont cachés si bien qu’on ne peut les voir, mais de ce qu’ils ne sont pas visibles, est-ce à dire qu’ils n’existent pas. Au contraire, plus ils sont nombreux, plus on les cache, et plus cruels pour eux, sont ceux qui causent leurs maux.

Il est vrai que toute violence et surtout la cessation de l’activité gouvernementale, c’est-à-dire de la violence organisée, gâtera cette beauté extérieure de la vie, mais sans déranger cette vie ; elle montrera seulement la possibilité d’y remédier.

Jusqu’à ces derniers temps, jusqu’à la fin du XIXe siècle, les hommes ont pensé et cru qu’ils ne pouvaient vivre sans gouvernement ; mais la vie marche, les conditions de la vie et les idées des hommes se modifient et, malgré les efforts des gouvernements pour retenir les hommes