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grossière et cruelle. D’une manière ou d’une autre, les hommes de science et avec eux toutes les classes aisées, veulent, coûte que coûte, défendre la distribution et la division actuelles du travail qui donnent la possibilité de produire cette grande quantité d’objets dont ils profitent. Les hommes de science et avec eux tous les hommes des classes aisées appellent civilisation, l’état économique actuel, et ils voient en elle — chemin de fer, télégraphe, téléphone, photographie, rayon Rœntgen, cliniques, expositions, etc., — quelque chose de tellement saint qu’ils n’admettent pas même l’idée d’un changement qui pourrait détruire cela en tout ou en partie. Selon la doctrine de cette science, on peut changer tout sauf ce qu’ils appellent la civilisation, bien qu’il soit de plus en plus évident que cette civilisation ne peut exister que par l’oppression des travailleurs. Mais les hommes de science sont si convaincus que cette culture est le plus grand des biens qu’ils disent avec hardiesse le contraire de ce que disaient autrefois les juristes : Fiat justitia, pereat mundus ; maintenant on dit : Fiat cultura, pereat justitia. Et non seulement on parle, mais on agit ainsi. En pratique et en théorie, on peut changer tout, sauf la civilisation, sauf les usines, les fabriques et tout ce qui se vend dans les magasins.

Et moi je pense que les hommes éclairés qui