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force les hommes spirituels, instruits à affirmer avec assurance et opiniâtreté un mensonge aussi grossier que celui-ci : qu’il est mieux pour les ouvriers d’abandonner la vie heureuse et saine de la campagne pour aller aux fabriques et aux usines détruire leur corps et leur âme.


VI

L’INSOLVABILITÉ DE L’IDÉAL SOCIALISTE


Même en admettant cette affirmation injuste et contraire à toutes les qualités de la nature humaine : qu’il est mieux pour les hommes de vivre dans les villes et de faire aux fabriques un travail machinal et forcé, que de faire à la campagne un travail libre, l’idéal même auquel conduit, selon les hommes de science, l’évolution économique, renferme en soi une contradiction qu’on ne peut nullement expliquer. Cet idéal consiste en ce que les ouvriers seront maîtres des instruments de production et profiteront de toutes les commodités et de tous les plaisirs qui sont actuellement réservés aux hommes aisés. Tous seront bien logés, bien vêtus, bien nourris, tous seront éclairés à l’électricité, et marcheront sur l’asphalte, tous fréquenteront les concerts et les théâtres ; tous liront les jour-