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pas l’effroyable bêtise et la cruauté dont est pleine la doctrine de l’Église. Nous ne les remarquons pas, mais les enfants, eux, les remarquent et leur âme se déforme irrémédiablement par cette doctrine. Nous n’avons qu’à comprendre clairement ce que nous faisons en enseignant aux enfants ce qu’on appelle l’instruction religieuse pour être effrayés du terrible crime qui résulte de cet enseignement. Pur, innocent, n’ayant été encore ni trompeur ni trompé, l’enfant s’adresse à nous, à des hommes qui savent la vie et qui possèdent ou peuvent posséder toutes les sciences connues de notre temps par l’humanité, il nous interroge sur ces principes suivant lesquels l’homme doit diriger sa vie ; et que lui répondons-nous ? Souvent même, nous ne lui répondons pas, mais nous devançons ses questions afin d’avoir prête la réponse à ses questions, nous lui répondons par la légende hébraïque, grossière, illogique, souvent stupide et surtout cruelle, que nous lui racontons soit en original, ou ce qui est pire, dans notre propre version. Nous lui donnons, en le lui faisant croire pour la sainte vérité, ce que nous savons être impossible et qui n’a pour nous aucun sens, à savoir : qu’il y a six mille ans une créature étrange et sauvage, que nous appelons Dieu, songea à créer le monde, qu’elle le créa ainsi que l’homme, et que l’homme a péché, que Dieu