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affaires, et vous êtes-vous réunis dans cette petite ville de Suisse ? Pourquoi êtes-vous allés tous ce soir écouter la chanson du petit mendiant dans un respectueux silence ? S’il lui avait plu de continuer, vous seriez encore au balcon. Pour de l’argent, pour des millions, vous chasserait-on de votre patrie et vous laisseriez-vous réunir de force ici, à Lucerne, dans ce petit coin ? Pourrait-on vous payer pour vous contraindre à vous réunir sur ce balcon et à y demeurer silencieux et immobiles ? Non. Une seule chose vous force à agir et vous y forcera éternellement avec plus de puissance que tout autre moteur : c’est le besoin de poésie, dont vous n’avez pas conscience, mais que vous éprouvez et que vous éprouverez toujours tant qu’il restera en vous quelque chose d’humain.

« Ce mot de poésie vous fait rire, vous