Page:Tolstoï - Le Prince Nekhlioudov.djvu/193

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sa montre en or, la remit dans son gousset et sortit sans se presser. Il revint peu après, avec le champagne, suivi de deux autres kelleners.

Ceux-ci s’assirent près de la laveuse de vaisselle et nous regardèrent avec la joyeuse condescendance de parents qui contemplent leurs enfants en train de commettre quelque espièglerie. Seule, la bossue nous regardait avec une sympathie exempte de raillerie. Quoique les regards de ces laquais m’impressionnassent d’une très désagréable manière, je pris l’air le plus dégagé pour faire boire le chanteur et entamer la conversation avec lui. Je pus alors l’examiner plus complètement à la lumière. C’était un tout petit bonhomme, très bien proportionné, trapu, presque un nain ; ses cheveux étaient courts, durs et noirs, ses grands yeux étaient bruns, humides, dépourvus de cils, et sa bouche d’un