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le même. Plutôt fut-ce un peu mieux quand il y en eut cinq. La vie était toujours empoisonnée de la peur pour les enfants, non seulement par leurs maladies réelles ou imaginaires, mais même par leur simple présence. Moi du moins, pendant toute la durée de ma vie conjugale, tous mes intérêts et tout mon bonheur dépendirent de la santé de mes enfants, de leur état, de leurs études. Les enfants, il n’y a pas à dire, c’est chose grave — mais tous doivent vivre, et, en notre temps, les parents ne peuvent plus vivre. La vie régulière n’existe pas pour eux : toute la vie de famille est suspendue à un cheveu. Quelle chose terrible que de recevoir subitement la nouvelle que le petit Basile vomit ou que Lise a fait ses besoins avec un peu de sang ! Immédiatement, vous abandonnez tout, vous oubliez tout, tout n’est rien… Ce qui est essentiel, c’est le médecin, le lavement, la température… Vous ne pouvez entamer une causerie sans que le petit Pierre n’accoure d’un air soucieux demandant si on peut manger une pomme ou