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d’être tel que pour me tourmenter et qu’en lui vivait toujours le même sentiment d’autrefois, et je m’efforçais de le provoquer à le laisser voir ; mais lui, chaque fois, il éludait toute franche explication ; on eût dit qu’il me soupçonnait de dissimulation et qu’il craignait comme un ridicule toute manifestation de sensibilité. Ses regards et son air semblaient dire : « Je sais tout, il n’y a rien à me dire ; tout ce que tu voudrais me confier, je le sais ; je sais que tu dis d’une manière et que tu agis d’une autre. » Au commencement, je m’offensai de cette crainte qu’il témoignait d’être franc avec moi, puis je m’habituai à cette pensée que chez lui ce n’était pas un défaut de franchise, mais bien l’absence d’un besoin de franchise.

À mon tour, ma langue n’aurait plus été capable de lui dire tout à coup que je l’aimais,