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Président, du Mikado ou des premiers ministres, partout où il y aura le pouvoir des uns sur les autres, il n’y aura pas de liberté, mais l’oppression des uns par les autres. C’est pourquoi le pouvoir doit être détruit.

Mais comment le détruire ? Et comment, en détruisant le pouvoir, s’arranger pour que les hommes ne retournent pas à l’état sauvage de la violence grossière exercée par les uns sur les autres ?

Tous les anarchistes — comme se nomment les propagateurs de cette doctrine — sont tout à fait d’accord entre eux sur la réponse à la première question et ils disent que le pouvoir, pour être détruit efficacement, doit être détruit, non par la force mais par la conscience qu’auront les hommes de son inutilité et de son danger. Mais à la seconde question : Comment doit être établie la société sans le pouvoir ? ils répondent différemment.

L’Anglais Godwin, qui vivait à la fin du XVIIIe siècle et au commencement du XIXe, et le Français Proudhon, qui a écrit au milieu du siècle dernier, répondaient à la première question qu’il suffit, pour détruire le pouvoir, que les hommes aient conscience que le bien général (Godwin) et la justice (Proudhon) sont violés par le pouvoir et que si l’on répand dans le peuple la conviction que le bien général et la jus-