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Pouvons-nous imaginer des Romains et des Barbares acceptant la doctrine du Christ dans le sens où nous l’entendons maintenant ? Est-ce que les Romains et les Barbares pouvaient croire que la violence ne peut mener qu’à l’augmentation de la violence, que les tortures, les supplices, les guerres n’expliquent et ne résolvent rien, mais embrouillent et compliquent tout ?

L’énorme majorité des hommes de ce temps n’était pas apte à comprendre la doctrine du Christ par la voie morale. Il fallait les y amener par la vie elle-même, par les moyens qui montrent, en pratique, que chaque écart de la doctrine entraîne le mal.

La vérité chrétienne qui, autrefois, ne se reconnaissait que par le haut élan du sentiment prophétique est devenue la vérité facilement accessible même à l’homme le plus simple et, de nos jours, cette vérité s’impose à chacun.

L’évolution de la conscience ne se fait pas par bonds, elle n’est pas discontinue et l’on ne peut jamais trouver la limite qui sépare deux périodes de la vie de l’humanité ; et cependant elle existe, comme il en existe une entre l’enfance et l’adolescence, entre l’hiver et le printemps, etc. S’il n’y a pas un trait limitrophe, il y a une période transitoire, et c’est celle que vit maintenant l’humanité européenne. Tout est