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monta en souriant. Il était d’une humeur douce et caressante ; son frère l’avait connu ainsi dans son enfance ; il parla même de Serge Ivanitch sans amertume. En voyant Agathe Mikhaïlowna, il plaisanta avec elle, et la questionna sur tous les anciens serviteurs de la maison ; la mort de Parfene Denisitch parut l’impressionner vivement, sa figure prit une expression d’effroi ; mais il se remit aussitôt.

« Il était très vieux, n’est-ce pas ? » dit-il, et changeant aussitôt de conversation : « Eh bien, je vais rester un mois ou deux chez toi, puis j’irai à Moscou, où Miagkof m’a promis une place, et j’entrerai en fonctions. Je compte vivre tout autrement, ajouta-t-il. Tu sais, j’ai éloigné cette femme.

— Marie Nicolaevna. Pourquoi donc ?

— C’était une vilaine femme qui m’a causé tous les ennuis imaginables. »

Il se garda de dire qu’il avait chassé Marie Nicolaevna parce qu’il trouvait le thé qu’elle faisait trop faible ; au fond, il lui en voulait de le traiter en malade.

« Je veux, du reste, changer tout mon genre de vie ; j’ai fait des bêtises comme tout le monde, mais je ne regrette pas la dernière. Pourvu que je reprenne des forces, tout ira bien ; et, Dieu merci, je me sens beaucoup mieux. »

Levine écoutait et cherchait une réponse qu’il ne pouvait trouver. Nicolas se mit alors à le questionner sur ses affaires, et Constantin, heureux de pou-