Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/370

Cette page a été validée par deux contributeurs.

En ce moment, un général de haute taille vint à traverser le pavillon ; Alexis Alexandrovitch, interrompant brusquement son discours, se leva avec dignité et fit un profond salut :

« Vous ne courez pas ? lui dit en plaisantant le général.

— Ma course est d’un genre plus difficile », répondit respectueusement Alexis Alexandrovitch, et, quoique cette réponse ne présentât aucun sens, le militaire eut l’air de recueillir le mot profond d’un homme d’esprit, et de comprendre la pointe de la sauce[1].

« Il y a deux côtés à la question, reprit Alexis Alexandrovitch : celui du spectateur aussi bien que celui de l’acteur, et je conviens que l’amour de ces spectacles est un signe certain d’infériorité dans un public… mais…

— Princesse, un pari ! cria une voix, celle de Stépane Arcadiévitch s’adressant à Betsy. Pour qui tenez-vous ?

— Anna et moi parions pour Kouzlof, répondit Betsy.

— Moi pour Wronsky… une paire de gants.

— C’est bon.

— Comme c’est joli… n’est-ce pas ? »

Alexis Alexandrovitch s’était tu pendant qu’on parlait autour de lui, mais il reprit aussitôt :

« J’en conviens, les jeux virils… »

  1. Les mots en italique sont en français dans le texte.