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Les deux jeunes gens, l’étudiant et l’officier, étaient du même âge, amis d’enfance, et tous deux beaux, mais d’une beauté toute différente. Boris était grand, blond, ses traits étaient fins et réguliers, son visage calme et beau. Nicolas n’était pas très grand, il avait des cheveux bouclés, l’expression de son visage était ouverte. Sur sa lèvre supérieure se montrait déjà un petit duvet noir, et tout son visage exprimait l’entrain et l’enthousiasme.

Nicolas rougit dès en entrant au salon. On voyait qu’il cherchait et ne trouvait que dire. Boris, au contraire, se ressaisit immédiatement et raconta tranquillement et en plaisantant qu’il connaissait cette Mimi-poupée quand elle était encore jeune et quand elle n’avait pas le nez cassé, et que depuis cinq ans, elle avait vieilli et avait eu le crâne défoncé. En racontant cela il regardait Natacha. Natacha se détourna de lui, regarda son frère cadet, qui, les yeux clos, riait d’un rire contenu ; et n’ayant plus la force de se retenir, elle sauta et s’enfuit de la chambre aussi vite que le lui permettaient ses petites jambes agiles. Boris ne riait pas.

— Il me semble que vous voulez aussi partir, maman ? Il faut une voiture, dit-il, en s’adressant avec un sourire à sa mère.

— Oui, va, et donne l’ordre d’atteler, répondit-elle en souriant.