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en injuriant un soldat de la façon la plus grossière. Dans de longs chariots allemands cahotés sur la route pierreuse, les blessés pâles, bandés et sales étaient assis par six et plus. Quelques-uns causaient (il entendait les conversations russes), les autres mangeaient du pain ; les plus blessés regardaient, en silence avec une sympathie douce, maladive, le courrier qui galopait devant eux.

Le prince André donna l’ordre d’arrêter et demanda à un soldat dans quelle affaire ils avaient été blessés. « Avant-hier sur le Danube, » répondit le soldat. Le prince André tira sa bourse et remit aux soldats trois pièces d’or.

— Pour tout le monde — fit-il à l’officier qui s’avançait. — Guérissez, enfants, il y a encore beaucoup à faire ! — dit il aux soldats.

— Eh bien, monsieur l’aide de camp, quelles nouvelles ? demanda l’officier qui désirait visiblement entrer en conversation.

— Bonnes ! En avant ! — cria-t-il au postillon ; et il galopa plus loin.

Il faisait déjà nuit quand le prince André entra à Brünn et se vit entouré de hautes maisons, des feux des boutiques, des fenêtres, des maisons et des réverbères, des jolis équipages qui glissaient sur le pavé et de toute cette atmosphère de grande ville animée, toujours si attrayante pour le militaire après le camp. Malgré sa course rapide et une nuit sans sommeil le prince André, en appro-