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— Non, attendez, attendez ! — Et en chuchotant il se mit à lui parler à l’oreille. — Je baisais sa main ; je pleurais ici, près d’elle. Je lui causais beaucoup. Je sentais l’odeur de ses parfums, j’entendais sa voix. Elle me parla beaucoup une nuit. Ensuite je pris mon violon et me mis à jouer doucement, et à ce que je crois, admirablement. Mais il se fit quelque chose de terrible. Je n’ai pas peur des bêtises, je n’y crois pas ; mais pour ma tête ça devenait mauvais, — dit-il avec un sourire aimable et en portant la main à son front. — J’ai été effrayé pour mon pauvre esprit. Il me semblait que quelque chose se passait dans ma tête. Peut-être n’était-ce rien ? Qu’en pensez-vous ?

Tous deux se turent quelques minutes.

Und wenn die Wolken sie verhüllen
Die Sonne bleibt doch ewig klar
[1],


chanta Albert en souriant doucement. N’est-ce pas ? — ajouta-t-il.

Ich auch habe gelebt und genossen.[2]

— Ah ! le vieux Pétrov, comme il vous interprète bien tout cela.

  1. Quoique les nuages couvrent le soleil,
    il reste toujours clair.
  2. J’ai aussi vécu et joui.